dimanche 12 février 2017

Klaxum ergo sum

9 février

Nous sommes installés à l'avant du bus (très) local qui nous mène en 7 heures de Munnar à Allepey, soit 230 km. À 6h30 du matin, le bus s'ébranle, tremblant de toute sa ferraille, pour se lancer dans les 1500 m de dénivelée des ghats jusqu'à la plaine.

La climatisation naturelle se met aussitôt en marche puisque les fenêtres ne sont équipées que de barreaux sans vitres. À cette heure du petit matin, engoncés dans nos vestes de montagne, autant dire  que l'on s'en passerait volontiers !
Le chauffeur, lourdement installé dans son grand fauteuil, tient solidement en mains un volant gigantesque presque horizontal. L'âge du bus n'ayant pas permis de le doter des derniers perfectionnements techniques, tourner, changer de vitesse ou freiner demande une force physique certaine ! 
Les lacets de la route s'enchaînent au début presque sans discontinuer, il n'est pas question de lâcher le volant, que les mains habiles du chauffeur font tourner comme une toupie.
Néanmoins la main gauche est obligée de temps en temps d'enchaîner les vitesses. Mais en plus, avant chaque virage, un petit coup de klaxon retentit ! Pourtant il n'a pas trois ou six bras ! En fait, la main droite du chauffeur vole si rapidement du volant vers le petit levier-klaxon que l'on n'a pas le temps de le voir lâcher sa prise ! 
Si par malheur, un autre bus arrive dans le virage au même moment que notre bus, l'étroitesse de la route oblige les deux poids lourds à un quasi -arrêt, permettant alors aux mains de quitter le volant ; et alors, c'est le déchaînement, le doigt reste appuyé sur le petit levier pendant de longues secondes jusqu'à ce que la tension retombe !
Dans la plaine, les routes sont moins tortueuses. Notre bus essaie de tenir sa moyenne. La technique change : dès que se profile à l'horizon un usager de la route, piéton, voiture, camion, rickshaw, moto, vache, la main se détache du volant et tapote sur le levier façon pointillé. Si le malheureux usager ne se met pas de côté assez rapidement, les pointillés deviennent plus longs pour devenir continus et rageurs si le bus est obligé de ralentir ! S'il doit s'arrêter .... !!!
En se rapprochant de la ville, la circulation devient plus dense, le klaxon est comme bloqué sur la position "marche" avec de temps en temps une interruption ! C'est la conduite "pompier" ! Le seul problème, c'est que cela n'en a pas l'efficacité, chaque véhicule usant du même stratagème d'intimidation ! 
Le klaxon plonge ses racines profondément dans la psychologie des chauffeurs indiens. Un bus sans moteur, c'est embêtant, mais un bus sans klaxon, c'est une vraie panne !


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