lundi 14 avril 2014

Une soirée à Valparaiso

13 avril


Cette fin d'après midi, je me bats avec le clavier QUERTY de
l'ordinateur de l'hôtel Fauna pour rédiger un article du blog.
Tout-à-coup l'écran devient tout noir !
La réceptionniste peste au
même moment : elle vient de perdre toutes les données de son client !
Avec beaucoup de patience, elle m'explique que le réseau électrique
est coupé dans toute la ville : un incendie s'est déclaré dans les hauteurs des cerros, qui a dû endommager les câbles. De la terrasse de l'hôtel, nous découvrons qu'une épaisse fumée a en effet envahi tout le ciel, magnifiquement ensoleillé une heure auparavant !
Quelques instants plus tard, la nuit est tombée, le courant électrique
est revenu après avoir été coupé encore deux fois. Nous décidons de
descendre au port chercher un distributeur de billets et dîner !
La première banque est hermétiquement grillagée. Le DAB de la deuxième
n'est ouvert qu'aux heures ouvrables ! Un papier scotché sur la porte
cadenassée de la troisième indique "fuera de servicio" ! Le quatrième
DAB me laisse insérer ma carte et faire ma commande de billets, pour
me signifier enfin d'un air narquois "operation not authorized" !
Dix-huit banques plus tard, il faut nous rendre à l'évidence : à
Valparaiso, un soir, et ce soir-là particulièrement, nous ne
trouverons pas de cash !

Problème : pas de cash, pas de dîner sauf si un restaurant accepte
notre carte Visa. Nous nous asseyons dans un bar où la musique bat son.
plein et avant de commander notre pisco sour, on demande d'un air
assuré : "se puede pagar con la tarjeta ? "
"La maquina no fonctiona ahora, pero dentro de una hora quizas", nous
répond-il pour être arrangeant !
Il ne nous reste plus qu'à battre en retraite et à rentrer à l'hôtel.
Au moment où nous arrivons au pied du funiculaire qui doit nous y
monter, tout devient noir : il fait une nuit profonde, le courant a
sauté, la lune est totalement cachée par le nuage de fumée de
l'incendie. La dame du funiculaire me tend brutalement son téléphone
portable : je l'éclaire pendant qu'elle ferme à double tour la porte
d'accès. On ne voit pas à 50 cm. Je lui demande où se situe l'escalier
qui permet de monter à la rue de l'hôtel ; malgré l'épaisse nuit qui
nous entoure je la vois blêmir et bégayer : "no ! no escaliera ! no la
noche ! no la noche sin luz !"
Nous reprenons donc la grand´rue, au milieu de dizaines de lucioles,
chacun essayant d'éclairer les innombrables dénivellés de trottoir,
les nids de poules et les travaux en cours avec son téléphone ou une
petite torche ! D'un seul coup le mystère d'une ville comme
Valparaiso, déjà impressionnant la journée, devient écrasant dans la
nuit absolue, où chaque recoin, chaque marche, chaque renfoncement de
porte prend des allures d'embuscades ! Les sirènes de pompiers allant
de manière désordonnée d'un bout de la ville à l'autre, ajoutent de
l'angoisse à cette ambiance inhabituelle !
A l'hôtel, la machine à carte Visa fonctionne !




Sur la terrasse où nous dînons, nous pouvons alors voir l'avancée des
flammes de l'incendie qui gagne toujours du terrain. Nos voisins
rentrent à l'intérieur de la salle à manger, les retombées de cendres
commençant à s'intensifier.
Le lendemain matin, le veilleur de l'hôtel qui nous prépare le petit
déjeuner avant de prendre le bus, nous raconte les larmes aux yeux,
qu'il n'a jamais vu une catastrophe pareille à Valpo et que deux
salariés de l'hôtel ont tout perdu dans l'incendie de leur maison.

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